Marie Jacquot : La musique in concreto

« Concert pour une société ouverte », Konzerthaus, Berlin, 24 mars 2019



« Le plus important n’est pas la musique mais la communication entre ceux qui la jouent. »

Le 24 mars 2019, Marie Jacquot dirigera un concert exceptionnel au Konzerthaus de Berlin. La forme tout d’abord : se retrouveront ce soir-là sur la célèbre scène berlinoise des musiciens issus des sept orchestres de la capitale. Tous volontaires pour jouer ensemble.

Et le fond ? Des oeuvres musicales qui livrent, chacune à leur manière, un message d’universalité et de concours des cultures.  Au programme, Ulvi Cema Erkin, Astor Piazzolla, Arturo Marquez, Charles Ives, Maurice Ravel… 

Présenter ce concert ainsi est toutefois plutôt réducteur. Derrière cet évènement, il y a en effet bien davantage : une initiative caritative pour venir en aide aux musiciens poussés à l’exil par des régimes voués et dévoués à l’obscurantisme et un jeune chef d’orchestre qui porte en elle une vision précise du rôle de la musique dans notre société. 

Soutenir les musiciens opprimés

« Unison for diversity – Concert for an open society » est un concert organisé par l’Opéra Comique de Berlin et qui réunira sur scène des musiciens volontaires issus des sept orchestres de Berlin. 

Gendermenmarkt Squarein historic Berlin. Laura VI pour Shutterstock

Ce concert caritatif est organisé au bénéfice de musiciens étrangers et poussés à l’exil par des régimes autoritaires ou asservis à des idéaux très peu respectueux de l’intelligence humaine. Leurs histoires sont celles d’un autre temps : cheveux rasés et instruments détruits par la police à la frontière.

Un concert qui souhaite donc contribuer à redonner à ces musiciens les moyens de vivre de leur art. 

La musique in concreto ou la vision d’un jeune chef français installé en Allemagne

Marie Jacquot a quitté la France alors qu’elle avait 19 ans. Durant ses années de formation à Vienne puis à Weimar, elle a mûri une vision intrinsèquement différente de la pratique musicale.

Marie Jacquot, chef d’orchestre. Crédit photo : Werner Kmetitsch

Par différence avec le système français, de nature élitiste et très centré sur la formation de solistes et d’individualités fortes, le système allemand vise en premier lieu la cohésion. Là-bas, on apprend à jouer ensemble et c’est l’esprit de groupe qui prime.

Cette différence fondamentale entre les deux systèmes d’éducation musicale influe nécessairement aussi sur la manière de pratiquer le métier de chef. Marie rappelle à plusieurs reprises que le « chef n’a pas de son ». Oui, le chef ne joue pas ! Il doit donc être conscient de son rôle : ni trop peu ni trop. Guider les autres musiciens, c’est devoir refuser une tradition autoritaire de la direction pour mieux réunir des musiciens tous issus d’horizons différents sous une seule et même direction. L’orchestre est un tout. On joue donc ensemble, chef compris.

Et le public dans tout cela ? Pour Marie Jacquot, faire de la musique ce n’est pas seulement le divertir et lui faire découvrir la musique d’un compositeur, qu’il soit mort ou vivant. Ce n’est pas non plus prôner des interprétations personnelles qui deviendront parfois des outils de communication ou de promotion personnelle. Faire de la musique, c’est plutôt assurer une mission : celle de l’éveil. De soi et de la société. 

La musique in concreto. 

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