
Un soir de fin d’hiver. Au fond d’une cour à Compiègne et en sous-sol, l’atelier d’un jeune artisan d’art vraiment pas comme les autres.
Jérôme Wiss est facteur d’instruments mais disons le de suite, facteur d’instruments est une appellation bien trop fade pour s’appliquer à lui. C’est qu’il invente et réinvente les cuivres, et surtout ceux qui portent un drôle de nom : Saxhorn, euphonium, ophicléide, hélicon….
Des hélicons en mi bémol ? Personne n’est assez fou….
Hélicon ! Cela fait trois ans déjà qu’il travaille sur ce projet, depuis la conception acoustique, le dessin en 3D, la fabrication du prototype en passant par les essais avec les musiciens…. Demain, ils quitteront l’atelier.
Jérôme Wiss présente les hélicons qu’il livrera le lendemain à la Garde Républicaine. Crédit photo : Anne-Sandrine Di Girolamo
Cinq hélicons commandés par la Garde Républicaine. Et pas n’importe lesquels ! Des modèles en mi bémol car seule la Garde Républicaine joue de l’hélicon en mi bémol…. Habituellement, l’instrument, majestueux, se fabrique en fa ou en si bémol. Peu importe ? Oh que non. C’est justement par là qu’il faut commencer. Personne n’est assez fou pour fabriquer un modèle d’hélicon en mi bémol alors que seulement 5 spécimens seront produits. Personne ? Si, Jérôme.
Pour l’invention et contre les brevets
Diplômé du prestigieux et unique en France Institut technologique européen des métiers de la musique (ITEMM), Jérôme a très vite su quel serait le devenir véritable de sa passion pour les cuivres : fabriquer, inventer, réinventer et non pas réparer. Et des idées, il en a … entendez-le évoquer son système de piston spécial (alors que depuis 1850, tous les facteurs utilisent des pistons Périnet) et vous comprendrez à quel point notre facteur d’instruments est un inventeur né, digne successeur des frères Sax.

Jérôme décrit donc ses diverses inventions… A-t-il déposé les brevets ? La réponse de Jérôme en dit long sur sa détermination : « Je suis contre les brevets ! »
Une telle position, déstabilisante pour un juriste, est le fruit d’une réflexion nourrie de notre artiste. « Si les gens copient ce que je fais, moi je vois cela autrement… Je suis presque content parce que cela veut dire qu’au fond, c’est moi qui ai raison. Ca me va… ». Et de poursuivre en expliquant à quel point l’idée de brevet, de dépôt de modèle ou de dessin à l’INPI est assez réductrice puisqu’elle bridera d’autres créateurs…
Le nouveau ou le neuf ? Une vision personnelle de la facture instrumentale
La vision de la facture instrumentale défendue par Jérôme est précieuse et différente. « Quitte à créer de nouveaux instruments, plutôt que de copier tous les autres, autant faire quelque chose de radicalement nouveau. Quitte à ce que cela ne marche pas ! »

Un parti pris courageux. La passion d’un créateur pour la nouveauté. Celle qui propose (l’invention) et non pas celle qui reproduit (le neuf). Ainsi, soutenir la facture instrumentale française, c’est peut-être évoquer (et déplorer) la concurrence chinoise. C’est sans nul doute également avoir l’ambition et la fierté du nouveau. A Compiègne, dans un atelier en sous-sol, on fait du nouveau, sept jours sur sept…
Ensemble, soutenons le travail de nos artisans d’art ! Pour découvrir le site internet de Jérôme, il vous suffit de cliquer sur le lien affiché ci-dessous.