
Julien Behr fête aujourd’hui dix ans de carrière. Le 11 juillet 2009, l’Orphée aux enfers d’Offenbach résonnait dans la cour de l’Archevêché à Aix-en-Provence et le ténor faisait là une première apparition professionnelle sur scène sous les traits d’Orphée. Christophe Rizoud publiait alors une revue de la représentation sur Forum Opera. « Julien Behr est un Orphée bien sage pour un mari volage« , écrivait-il.
Dix ans plus tard, Julien raconte le moment où Bernard Foccroulle, directeur du Festival d’Aix-en-Provence lui a proposé ce premier vrai rôle.
Rien n’est calculé. J’ai cette insouciance qui me sert dans ma manière de faire le travail sur scène. Je suis là et je donne tout !
Julien Behr
Orphée aux enfers, « une anecdote incroyable »
Julien Behr fait encore partie des « jeunes chanteurs ». « Oui, il parait ! ». Julien rit et se souvient. « Tiens, une anecdote incroyable. Le 11 juillet 2009, j’ai tenu mon premier vrai rôle à Aix-en-Provence. 2009 donc, la première vraie audition de ma vie. C’était pour l’Académie du festival d’Aix-en-Provence qui est un tremplin génial pour tous les chanteurs du monde. Alors j’y vais et évidemment, tous les gars du CNSM le font. J’ai été sélectionné pour la finale à Bastille et vraiment il y avait peu d’élus. Je chante…. Le directeur du festival, Bernard Foccroulle vient me serrer la main et me dit « Cela ne va pas le faire pour l’Académie, nous sommes désolés. En revanche, nous serions ravis si vous acceptiez le rôle titre à l’Archevêché : Orphée. »
Taquin Bernard Foccroulle. Julien en est encore tout ému. « Rien que de le raconter, c’était tellement incroyable, j’en suis encore …, je n’ai pas les mots ». Julien prend alors son téléphone et relit l’article de Christophe Rizoud. « Julien Behr est un Orphée bien sage pour un mari volage ». Il rit de bon coeur et se tait. Au fait, savez-vous comment ce jeune ténor a embrassé la vie de chanteur d’opéra ? En manquant les inscriptions administratives au concours du barreau des avocats à Lyon. Encore une jolie histoire.
Julien Behr : « Je suis entré au Conservatoire parce que j’ai manqué l’inscription administrative du concours d’avocat ».
Un étudiant en droit des affaires
Julien était étudiant en cinquième année à la faculté de droit de Lyon III. Il participait aux concours de plaidoirie car il aurait aimé défendre la veuve et l’orphelin comme il le dit. Il faisait aussi des stages chez Francis Lefebvre comme tout bon étudiant en droit des affaires. « Je suis entré au conservatoire parce que j’ai manqué l’inscription administrative au concours d’avocat. J’ai réalisé trop tard que je venais de manquer la date butoir pour s’inscrire. Alors, le soir même, je vais au théâtre. Ma mère est là et je suis dis « c’est la merde !!! ». Pardon pour l’expression…«
Sa voix ne serait donc pas celle d’un avocat du barreau. Mais ténor oui. « Je vois, a posteriori, que la vie m’a attirée vers ce métier. Un tel concours de circonstances ! Je manque une inscription alors qu’au même moment, je prends des cours de chant et que je travaille ma voix. Alors, évidemment, ma mère m’a encouragé à saisir cette opportunité. » Julien se présente donc au concours du CNSM de Lyon. « Pour moi, ce n’était que du bonus ! Je n’avais rien à perdre et j’ai donc chanté Paris de La Belle Hélène. Je ne savais pas chanter mais je crois que mon aisance sur scène a plu. ».
L’insouciance en plus
Une telle insouciance Julien ! « Pour ce concours, j’ai chanté tout ce que je savais. J’ai fais mon cirque habituel et ils m’ont pris. Je ne suis même pas allé aux résultats d’ailleurs. Si ! Un peu plus tard, après la fête avec les copains. La directrice du département est arrivée et a éclaté de rire en me disant que j’étais pris. » Evidemment, nous lui demandons de s’expliquer. Le cirque habituel ? « Ce qui leur a plu, c’est que j’étais à l’aise. Tout était bonus pour moi. Sur scène, c’est la même chose. Je ne me soucie pas de la présence du public parce que cela m’exalte en fait. » Il admet bien volontiers avoir des côtés cabot mais ce qu’il aime plus que tout, c’est s’exprimer devant le public.
10 ans plus tard, un virage de répertoire ?
A celui qui souhaite devenir avocat, on soupçonne souvent des idéaux, de grandes et belles idées. Nous avons donc posé la question du rôle. Julien Behr croit-il aux rôles qui ont un sens ? « Non, je ne crois pas être motivé par un rôle qui a un sens. Mais je réalise maintenant que j’amorce un virage de répertoire. » Il est vrai que depuis son disque « Confidence » enregistré avec l’Orchestre de l’Opéra de Lyon dirigé par Pierre Bleuse, on sent chez Julien une envie d’ailleurs. « Je vais m’orienter vers un répertoire plus romantique. Je vois que j’aime être nourri par une intensité dramatique et que cela change pour moi la manière de travailler. »
Julien et son tempérament enflammé sur scène… « Oui, je m’y retrouve beaucoup. Ainsi, ce n’est pas le sens du rôle mais le romantisme du rôle qui est important pour moi. Plus on avance vers le dix-neuvième siècle, plus le situations sont romantiques et dramatiques. Du coup, ce n’est pas la même manière d’aborder les choses. Bref, quand on fait Werther ou Carmen, tous les rôles du dix-neuvième ou du vingtième siècle, c’est à coeur ouvert et j’adore ! » Julien se met à rire.
Joyeux anniversaire Julien !
Merci Julien Behr de cet entretien drôle, simple et naturel.
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