
Vanessa Benelli Mosell est pianiste. Acclamée comme étant l’une des plus talentueuses de sa génération, elle a déjà enregistré sept disques chez Decca Classics. Le dernier, consacré à Maurice Ravel, est sorti en décembre 2019.
Formée à l’Académie de piano d’Imola, au Conservatoire Tchaikovsky de Moscou puis au Royal College of Music de Londres, cette jeune pianiste italienne et parisienne impressionne. Les chemins de sa formation ont été structurants, celui de sa carrière s’annonce plus riche encore. Car l’artiste, précise et méticuleuse, est soucieuse d’entretenir et de nourrir son amour immodéré de la musique. Que le répertoire soit classique ou contemporain. Au piano ou à la direction.
En tant qu’interprète, le plus important pour moi, c’est le texte.
Vanessa Benelli Mosell
Vanessa Benelli Mosell : la musique vient avant toutes choses
Nous discutions de la musique de Debussy, de celle de Ravel aussi. Mais la première question, celle que nous aurions dû, ou pu, lui poser en premier lieu, concernait l’interprétation. Comment, une pianiste déjà aussi accomplie que Vanessa Benelli Mosell envisage-t-elle son rôle d’interprète ? « Je pense que la musique vient avant tout. Peut-être que l’interprétation, ce sont des choses qu’on ne parvient pas à faire. Ou en tout cas, c’est trop souvent cela. Je pense que, en tant qu’interprète, le plus important pour moi, c’est le texte. »
Cette méthode d’approche de la partition devait être explicitée. L’artiste continue. « Ayant souvent travaillé aux côtés de compositeurs contemporains, je peux vous dire qu’ils apprécient cette manière de travailler qu’on peut sûrement appliquer au passé, et en particulier, aux compositeurs du vingtième siècle. » Debussy, Ravel ? « Oui, avec Debussy et Ravel, on réinvente le rôle de l’interprète. Jusque là, nous avions l’interprète-compositeur comme Liszt, Paganini ou Mendelssohn qui réinventaient à chaque fois leur oeuvre. On ajoutait des notes, des cadences… Mais avec Debussy et Ravel qui sont compositeurs et de moins en moins interprètes, on comprend que l’interprète n’est plus au centre de la création mais à son service. »
Amoureuse de la musique de Maurice Ravel
Elle est parisienne depuis cinq ans et amoureuse de la musique de Maurice Ravel qui fait partie de son répertoire depuis toujours ou presque. Vanessa Benelli Mosell nous dit avoir joué certains préludes depuis l’âge de dix ans, tout comme la Pavane pour une infante défunte, présentée en première piste du disque sorti en décembre 2019.
« J’ai toujours été amoureuse de cette musique. Et passionnée, en général, de l’art français, de la littérature et de la peinture impressionniste qui ont inspiré les compositeurs. Ravel sait parfaitement exprimer cette façon pudique de cacher les sentiments qui inquiètent les français. Cette pudeur dans l’esprit, dans l’expression des émotions et des sentiments qui restent cachés au fond de soi. Cela, c’est quelque chose qu’on voit et qu’on ressent très bien dans la musique de Ravel. »
Autour du concerto en sol majeur
Construit autour du fameux concerto en sol majeur (qui ne s’en enchanterait pas ?), le reste du programme de ce disque est celui du coeur. Vanessa Benelli Mosell présente certaines oeuvres de Ravel, moins connues du grand public que Gaspard de la nuit ou les Miroirs, et qui dévoilent le travail du compositeur, toujours inspiré par le passé. Le Tombeau de Couperin (pistes 8 à 13) est en une parfaite illustration. « Ravel s’est toujours inspiré du passé et d’un univers qui n’était pas celui de son époque. L’occasion pour nous de revivre des sonorités et une atmosphère classique néo-baroque que le compositeur met très bien en valeur tout en restant très avant-gardiste dans les harmonies et les sonorités qui sont très recherchées, tout en gardant une dimension claveciniste« .
Restent la Sonatine, merveilleusement exécutée. Ou la fameuse Pavane pour une infante défunte que Vanessa, en riant, nomme « le tube du disque ». Elle souhaitait que son disque s’adresse aux spécialistes et à ceux qui aimeraient découvrir la musique de Ravel. « Parce que c’est bien d’élargir les horizons musicaux. Il est intéressant de ne pas partir de Mozart ou de Chopin mais des compositeurs qui sont plus proches de nous et qui nous parlent davantage de nous-mêmes. »
Un chemin, puis l’autre
Vanessa Benelli Mosell a la voix posée et une manière bien à elle de s’exprimer. Déterminée et réfléchie, on sent chez elle un besoin inné pour l’approfondissement de toutes choses. Des cinq langues qu’elle parle couramment (« mais cinq langues, ce n’est pas beaucoup vous savez, dit-elle en riant »), de ses années d’études passées en Italie, en Russie, en Grande-Bretagne, de sa vie d’artiste et de parisienne, tout semble inviter l’artiste à redéfinir régulièrement ses modes d’expression.
Parmi les chemins possibles, et sans exclure les précédents, celui de la direction d’orchestre. Elle raconte amusée. « J’ai commencé à diriger des disques à l’âge de trois ans, à la maison. C’était donc bien avant cet engouement pour la femme chef d’orchestre. » Finaliste en 2019 du concours de direction d’orchestre MAWOMA organisé par Cartier et invitée à diriger le Wiener KammerOrchester à Vienne, Vanessa se perfectionne actuellement auprès du chef Daniel Harding. « J’aimerais devenir directeur musical d’un orchestre ».
Chez elle, le répertoire est une passion profonde et à l’origine de tout son cheminement. Pouvoir travailler certaines pages de la littérature musicale qu’elle n’aurait pas la possibilité d’envisager en tant que soliste la guide. La direction, une langue supplémentaire qu’elle parlera donc. Faisant d’elle une artiste qu’un mot français pourrait désigner parfaitement, s’il n’était galvaudé : phénoménale.
Un extrait du disque Maurice Ravel
Découvrez cet autre disque récent de Vanessa Benelli Mosell et Julien Martineau
Découvrir le site internet de Vanessa Benelli Mosell : https://www.vanessabenellimosell.com/