
Les Lunaisiens rendent hommage à Boris Vian en cette année 2020, parce que le plus polisson de nos écrivains aurait fêté ses 100 ans.
Et aussi parce que faire la fête à un répertoire de la chanson complexe et à sa redoutable vivacité d’esprit fait du bien à notre époque trop sagement assoupie.
Avec Le Code de la Route, Les Lunaisiens invitent dans notre siècle un microcosme vivifiant de chansonniers. Boris Vian, Charles Armand Ménard dit Dranem, Charles Cros, Alfred Jarry… Ces petits génies de « l’aventure pataphysicienne » avaient la fantaisie au coeur et l’art du réfléchir malgré soi bien ancré. Entre musique et littérature, l’alchimie fait frémir les neurones. Et quand on écoute la belle équipe composée d’Arnaud Marzorati (baryton), Agathe Peyrat (soprano), Pierre Cussac (accordéon), Raphaël Schwab (contrebasse) et Fabien Norbert (trompette) s’emparer de ce répertoire, on savoure sa capacité à insuffler à toute âme endormie une dose salvatrice de liberté à penser. Nul n’est, en effet, contraint de subir l’uniformisation du monde et des modes de pensée. Encore faut-il parfois bien vouloir écouter les artistes qui nous le rappellent.
Les Lunaisiens : La trompette à l’honneur, la voix jubilatoire
Boris Vian a montré dans nombre de ses écrits un visage humaniste. Les questions des libertés individuelles, de la société et des inégalités qu’elle porte en elle, de la guerre et du totalitarisme ont été au coeur de son travail d’écrivain. De façon faussement plus légère, cet « inventeur d’histoires » a travaillé pour le théâtre, la critique de jazz, la musique en tant que trompettiste et la chanson en tant qu’auteur et compositeur.
Lui dont le prénom a été soufflé à la maman par son amour de l’opéra (Boris Godounov de Moussorgski), il a partagé ses jeux d’enfance avec Yehudi Menuhim et avait un autre compagnon encore. La trompette, « instrument fétiche de ses vingt ans » écrit Arnaud Marzorati. La trompette, instrument autour duquel la contrebasse, l’accordéon, le ukulélé jubilent dans ce disque Le Code de la Route paru chez Muso.
A la scène, comme en littérature
Les Lunaisiens sur scène ? C’est un son magnifique. Avec Fabien Norbert à la trompette, Raphaël Schwab à la contrebasse et Pierre Cussac à l’accordéon, le public est comblé. Les Lunaisiens sur scène ? C’est une présence qui vous emporte et vous enferme dans une bulle d’évasion bienvenue.
Le duo formé par la soprano Agathe Peyrat et le baryton Arnaud Marzorati est ainsi jubilatoire. Les deux voix se complètent, et se complimentent à merveille. Les deux chanteurs incarnent, de plus, chacun un versant complémentaire de ce petit monde fantaisiste de la chanson « pataphysicienne ». Et puis le texte… Les textes ! Du Rock des petits cailloux, en passant par la Java des bombes atomiques. Ou la Marseillaise des requins ou la Cantate des boîtes, tout est éveil au « penser malgré soi ». C’est le monde de la liberté à penser des « pataphysiciens » qui nous est offert grâce à ces artistes. A les écouter, il ne manquerait presque plus rien à notre bonheur, sinon une irrésistible envie de les remercier.
Crédits photographiques : Edouard Niqueux