Le Trio Sõra au Châtelet ou l’épopée du proche et du lointain

Notre chronique sur le récital donné par le Trio Sõra au Théâtre du Châtelet à Paris le 17 décembre 2020.

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Trio Sõra

On ne s’interdira rien, pas même un oxymore puisque  cette année 2020 grippe et agrippe tant de choses. Le Trio Sõra a donné un récital dans le Grand Foyer du Théâtre du Châtelet  le 17 décembre 2020 devant quelques journalistes seulement. Ce soir-là, la reddition n’était pas bien loin, puisque l’année 2020 a eu raison des artistes et de nous tous et qu’elle en faisait encore la preuve. Au point de nous souffler l’idée que ce récital esseulé était d’essence épique.

L’épreuve du lointain

Qu’elle était donc loin la scène. Les quelques journalistes présents ont volé aux artistes leur entrée, puis l’arrière-scène sombre et désertée du théâtre pour se retrouver, tout à fait perdus et esseulés, dans la salle dorée du grand foyer. Techniciens de l’image et ingénieurs du son s’activent alors mais les projecteurs sont presque aussi nombreux que les humains. C’est dire à quel point nous avons soudain froid, dans cette salle du Foyer pourtant lumineuse et grandiose. 

Nous nous posons alors la question suivante. Les musiciennes du Trio Sõra vont-elle savoir habiter le lieu, le faire sourire de leur présence et de la musique ? A l’image du héros antique à qui les dieux préparaient une série de tourments et d’épreuves pour mieux le distinguer ensuite, nos musiciennes allaient donc devoir, ce soir là, faire la démonstration de leur énergie vitale de trio dans un lieu trop grand pour tout, et en particulier pour le son. 

L’épreuve du proche

Epreuve réussie. Epreuve dépassée même. Loin de la scène, loin du public, loin des journalistes, les musiciennes du Trio Sõra sont complices, unies et en communion avec le répertoire et entre elles.

On admire la cohésion sonore entre Clémence de Forceville au violon et Angèle Legasa au violoncelle. On savoure la virtuosité pleine d’intelligence de Pauline Chesnais au piano. Que l’on aime ces sourires, ces regards et toutes ces attentions de l’une vers l’autre. Le Trio Sõra a donc fait fi de l’épreuve du lointain et réussit aussi bien l’épreuve du proche. Qu’il s’agisse du Trio opus 11 de Fanny Mendelssohn ou du Trio opus 97 « à l’Archiduc » de Beethoven, le Trio Sõra est prêt à recevoir le public comme il se doit. Avec un talent fou, une énergie vitale rare et des forces démultipliées. Il a réussi l’épreuve covidienne du proche et du lointain. Souhaitons lui désormais de savourer très vite le plaisir simple de la scène rendue aux humains.  

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