Une Sonate à Kreutzer pour deux violoncelles vivifiante

Sonate à Kreutzer

La Sonate à Kreutzer, neuvième du cycle des dix sonates pour piano et violon de Beethoven est l’une des plus fameuses du compositeur. Ne l’est pas moins la nouvelle éponyme de Léon Tolstoï et ses tourmentées réflexions sur la relation entre les hommes et les femmes, le bien fondé du mariage et les angoisses de l’infidélité.

La version enregistrée par Gidon Kremer au violon et Martha Argerich au piano en 1995 est une référence. Sans doute parce qu’elle est une lutte sur pied d’égalité entre le violon et le piano. Ainsi que le souhaitait Beethoven. Ainsi que les musiciens étaient. Le piano livre bataille au violon. Le violon résiste. L’un et l’autre sont héroïques mais ensemble.

Il ne faudrait jouer ces morceaux-là qu’en des occasions importantes, quand on veut provoquer des actions répondant au caractère de cette musique.

Leon Tolstoï, La sonate à Kreutzer

Une Sonate à Kreutzer dans une version pour quintette à deux violoncelles

L’héroïsme des voix mises en présence. Voici sans aucun doute ce qui a fait le succès de l’interprétation de 1995. Il fait aussi l’intérêt de la version proposée par le Quatuor Zaïde et Bruno Delepelaire au label Nomad. Une Sonate à Kreutzer dans une version arrangée pour quintette à deux violoncelles ? Insolite, inédit et sacrément vivant.

Quatre ans après le décès de Beethoven à Vienne. Une version arrangée de la plus que fameuse Sonate à Kreutzer est éditée. Arrangée pour quintette pour deux violoncelles, elle fait figure d’hapax ou presque. « Seuls Boccherini et Onslow avaient déjà publié des oeuvres pour cette formation. Les deux violoncelles permettent un champ sonore presque inédit en musique de chambre, décuplant la profondeur et la puissance des basses. » , écrivent les musiciennes du Quatuor Zaïde. La version est enivrante bien que ses origines véritables restent floues. Une adaptation des éditions Simrock ? Une adaptation par Ferdinand Ries, l’un des élèves de Beethoven, Ferdinand Ries ou même d’une version par Beethoven lui-même ? Voilà qui restera mystère.

Les musiciennes du Quatuor Zaïde et le violoncelliste Bruno Delepelaire, Premier violoncelle solo de l’Orchestre Philharmonique de Berlin depuis 2013, communiquent avec force et talent leur compréhension fine de cette partition. Capables de maintenir le message premier des voix qui se livrent batailles, ils font honneur à la difficulté des ces mêmes voix qui se répartissent minutieusement, au point de se confondre. Et le son des deux violoncelles, puissant et profond, ajoute encore à la lecture possible, une ligne supplémentaire d’interprétation.