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Simone Rubino s’amuse de Bach et Piazzolla : Salvateur

Simone Rubino
Fuga y misterio

Le percussionniste italien Simone Rubino et l’Ensemble La Chimera s’amusent de Bach et de Piazzolla qu’ils réunissent brillamment dans un disque Fuga Y Misterio disponible au label La Musica. Ceci au nom d’une technique partagée (le contrepoint) et en l’honneur d’une forme compositionnelle historique (la fugue). Au coeur du tout, le rythme, complexe et travaillé. Et le son du vibraphone et du marimba qui mène avec allégresse et fraîcheur les instruments vénérables que sont le théorbe, le clavecin, le violon ou encore le violoncelle. Et puis la jeunesse de Simone Rubino que certains qualifieraient d’effrontée à conjuguer ainsi Jean-Sébastien Bach et Astor Piazzolla. Effrontée… ou conforme à ce qu’on attend (aussi) d’un artiste.

Il y a ceux qui affirment que le tango est une pensée triste que l’on danse. Comme si la musique naissait de pensées et non de sentiments.

Jorge Luis Borges, cité par Andrés Locatelli

Ce disque est une expérience à lui seul

On pourrait penser qu’il n’est pas sérieux mêler ainsi Bach et Piazzolla. C’est mettre de côté la formation musicale d’un Piazzolla auprès de la grande pédagogue Nadia Boulanger. C’est oublier plus encore la fascination du jeune argentin pour la musique de Bach. Evoquant le Nouveau Tango, l’auteur passionnant du livret qui accompagne le disque est précis. « On peut faire remonter notamment l’inspiration baroque de ce « jeune tango » au modèle de Bach (mais il ne s’y limite pas) : ce Johann Sebastian Bach que le petit Astor entendait depuis sa fenêtre du West Side et dont il allait approfondir les techniques, déjà à Paris, avec Nadia Boulanger. Un Bach qui venait d’être redécouvert et monumentalité au fur et à mesure que s’ouvrait la voie révolutionnaire de l’interprétation historique. »

D’autres crieront à l’outrage. Qu’il est pas sérieux d’imposer aux plus prestigieuses partitions de Bach le son du marimba et du vibraphone. Ces percussions, tout de même ! Sauf à prendre au mot Jorge Luis Borges et laisser la musique traduire, au temps présent et pour un public d’aujourd’hui, tout ce que Bach et Piazzolla réunis ont écrit pour des hommes de leur temps. Le rythme, que nos contemporains espèrent retrouver le plus vite possible dans leurs vies ralenties par une épidémie, est là, au coeur de ce disque vibrant. Si bien transcrit par Eduardo Egüez. Si bien partagé par le percussionniste Simone Rubino et les musiciens de l’Ensemble La Chimera, experts de la musique baroque. Voilà. Il ne vous reste plus qu’à vous forger votre propre opinion, en écoutant ce disque. En vous laissant guider par vos sentiments, et pas par vos pensées. Car il peut être salvateur d’accueillir un disque aussi créatif dans la forme que respectueux du fond.

Fuga Y Misterio, par Simone Rubino et La Chimera

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