Aline Piboule, Samazeuilh, Decaux, Ferroud, Aubert, et nous

Aline Piboule

Voici un disque qui renvoie à chaque mélomane la question. Sempiternelle, ou commune. Parfois lassante mais ô combien vive et justifiée à l’écoute du disque proposé par la pianiste Aline Piboule. S’égare-t-on ou se perd-t-on à entreprendre la découverte de pièces françaises oubliées ? L’oubli parfois justifié, parfois incompréhensible. Ecoutons donc Samazeuilh, Decaux, Ferroud et Aubert car l’oubli leur est cruel.

Un disque magnifique publié au label Printemps des Arts de Monte Carlo.

Aline Piboule et ce disque de chefs d’oeuvres inconnus

Le disque s’ouvre à l’évocation de la mer. Pas celle de Debussy. Moins illustre, tout aussi poétique. Et majestueuse. Voici Le chant de la mer (n°2, Clair de lune au large), par Gustave Samazeuilh, auteur d’une transcription pour flûte ou violon du Prélude à l’après-midi d’un faune par exemple. Alfred Cortot à qui était dédiée la pièce, ainsi que Francis Planté et Marguerite Long, avait vu juste. « Quels artifices sonores mieux que ceci, demande Alfred Cortot, rendraient-ils sensibles et l’indistinct murmure dont se berce la nuit et l’illusion de ces clartés vaporeuses qui moirent d’un reflet d’argent le paresseux frisson des vagues endormies ? « 

Au son des Clairs de Lune n°1 à 4 de Abel Decaux, on se met à songer. Abel Decaux, visionnaire ? Sans doute. Et visionnaire injustement découragé aussi, quelles qu’en soient les circonstances et les raisons. Il avait pourtant l’assise que procure l’enseignement à la Schola Cantorum et la charge de La Tribune du Sacré-Coeur. Restent des Clairs de Lune qui interrogent notre époque elle-même et son public peu curieux parfois.

Avec Pierre-Octove Ferroud, c’est autre chose. Décédé à la suite d’un accident à l’âge de trente-six ans, ce compositeur est un destin, aux prises avec la jeunesse, l’humour et la grivoiserie. Ses Types (Vieux Beau, Bourgeoise de qualité, Businessman) sont amusants comme des caricatures, acerbes mine de rien, à l’image d’une jeunesse de l’entre-deux guerres volontairement frivole et pourtant soucieuse.

« Le temps passe et les membres de l’Institut ne sont pas protégés de l’oubli », écrit non sans humour François-Gildas Tual auteur du livret remarquable qui accompagne le disque. Car Louis Aubert, élu à l’Institut en 1956, clôt le disque de ses Sillages, Op. 27, composés entre 1908 et 1912. Là encore, la musique appelle à d’autres références et fait entendre au public un émouvant appel à la reconnaissance. L’oubli, parfois justifié est ici incompréhensible.

Extrait

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